Ridley Scott, Exodus Gods and Kings

Malgré le bien qu’on peut penser des péplums réalisés par Ridley Scott (Gladiateur ou Le Royaume des cieux, en particulier), il faut reconnaitre qu’il n’y a pas grand chose à sauver de son dernier opus, Exodus Gods and Kings. Certes, ce remake du célèbre film de Cecil B. de Mille, Les dix commandements, dépasse son modèle par la qualité des effets spéciaux, et les dix plaies de l’Egypte, la vague finale qui engloutit l’armée du pharaon sont spectaculaires.  Mais le film est vide. Et pourquoi faire de Ramsès une sorte de boss de la Mafia qui machonne du chewing-gum ? Pourquoi tous les « méchants » du films sont-ils associés à une virilité trouble, amollie1 ? Les acteurs paraissent souvent sortis de la dernière superproduction dans laquelle ils jouaient, films policiers ou films de science-fiction. Rien dans leur jeu ne donne la mesure de la solennité de cette histoire dans l’histoire culturelle de l’Occident !

Le film oblige à se demander si les conventions hollywoodiennes en matière de jeu d’acteur, de gestuelle et de filmage (ces gros plans, ces plans de coupe sur les regards complices entre personnages, …) peuvent convenir à une fiction à fonds biblique. Hollywood veut en général donner aux personnages des films une humanité proche de celle des spectateurs, une humanité quotidienne. Cela ne sert pas vraiment le récit de la Sortie d’Egypte. Le récit biblique ne laisse pas beaucoup de place à l’humanité quotidienne.

De plus Ridley Scott, qui accorde beaucoup de prix aux effets spéciaux, n’investit pas la dimension religieuse et politique de son récit. Les scènes canoniques, si l’on peut dire, celles qui auraient donné du sens, sont sacrifiées. Celle des dix commandements devient ainsi une simple séance de gravure sur pierre. Ridley Scott se dispense de l’épisode du Veau d’or, sur lequel Cecil B. de Mille insistait dans un souci de moralité politique, ici absent.  Dieu a pour messager un petit enfant au visage rond, ce qui met le message divin au niveau du préau d’école.

Moïse finit en charrette, la main posée sur le coffret qui renferme les Tables de la loi, vieilli. Il semble pressé de quitter rapidement cette fiction pataude et ennuyeuse.

Stéphan Alamowitch

Film américain de Ridley Scott avec Christian Bale, Joel Edgerton, John Turturro (2 h 31)

Notes

Notes
1L’association était d’ailleurs déjà visible dans le primaire 300 au sujet de la bataille des Thermopyles.
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