Gouverner, c’est (mal) nommer

Le pouvoir entend procéder, après le « choc de simplification » annoncé pour les formalités administratives, à un « choc de moralisation » rapide afin de cautériser la  plaie que représente l’affaire Cahuzac. Qui n’approuverait ? Encore faut-il que le « choc » débouche sur des textes précis, judicieux, applicables rapidement, sans succession de décrets d’application ou embarras pratiques qui en réduiraient la portée.  Ce sera difficile, mais sait-on jamais !

Il reste que la pratique du pouvoir socialiste depuis onze mois a péché sur un autre plan qui pourrait appeler un « choc de moralisation », celui des nominations, prérogative dont l’exercice importe autant que de surveiller le patrimoine des élus et leurs liens avec les intérêts économiques.

François Hollande a aussi été élu pour que la « République des copains et des coquins », selon la vieille formule des années 70 qui concernait l’UDR et s’appliquait bien au pouvoir sarkozyste, cède la place à une République des procédures et des valeurs, y compris en ce qui concerne les processus de nomination.

Il est difficile de mesurer si les choses ont changé. Des exemples emblématiques sont néanmoins inquiétants : la tentative d’imposer l’ancienne présidente d’Areva à la présidence du conseil d’EADS, là pour le coup une insulte au bon sens, heureusement déjouée (nomination EADS) ; la nomination du nouveau directeur de Sciences-Po entérinée malgré une procédure calamiteuse ; le conseiller du Ministre du redressement productif, dix mois en fonction, candidat chez ArianeEspace. D’autres cas sont moins clairs.  Malheureusement, le pouvoir ne se rend même pas compte, pour ces trois exemples, de l’effet désastreux produit dans l »opinion.

Au delà des personnes concernées, qui sont ce qu’elles sont – et  qui ne sont pas forcément sans mérite -, c’est le procédé qui choque : au lieu, par exemple, de cabinets de conseil en recrutement qui susciteraient des candidatures, présélectionneraient les candidats, en évalueraient les mérites publiquement avant de soumettre les dossiers aux autorités de nomination, le passage en cabinet ministériel, le réseautage,  l’appui politique, le court-circuitage des sociétés concernées, ….

C’est aussi contre cela qu’on a voté en mai 2012.

Serge Soudray

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