Les propos imbéciles, invraisemblables de Vincent Peillon sur la laïcité, les juifs, l’étoile jaune et le racisme anti-musulman sont malheureusement typiques de ce qu’est devenu, dans une partie de la gauche, l’antiracisme des années 80.
Peillon, et c’est à son honneur, ne supporte pas le racisme dont est victime la minorité arabo-musulmane. Il ressent de l’empathie pour ce qu’elle peut éprouver, et veut dénoncer les discriminations qui la frappent. Il lui faut convaincre, attirer l’attention. Alors il recourt au vieux procédé rhétorique de l’amplification, de l’emphase. Et quelle meilleure amplification du propos que de comparer cette situation regrettable à celle des juifs pendant la guerre. Comme il est moins intelligent qu’il ne le pense et qu’il n’est pas bon orateur, il mélange tout, et son propos, qu’il ne contrôle plus, devient confus et malsain. Peillon confond les périodes, et relie des faits sans rapport (la laïcité comme cause de l’antisémitisme ?). Au delà des erreurs de fait, cette rhétorique a le malheur d’alimenter la thématique du « deux poids, deux mesures » – le subtext n’est pas difficile à déchiffrer -, thématique parfaitement insidieuse et mal venue en ce qu’elle fait des juifs les protagonistes d’un débat qui ne les concerne pas plus que les autres citoyens. Mauvaise combinaison de l’empathique et de l’emphatique !
Peillon a probablement bonne conscience : l’empathie qu’il ressent lui donne le droit, il le croit certainement, de procéder à cette amplification bien tordue. Comme Trump, Il est à sa manière dans la post-truth : la puissance de l’affect, le but qu’il vise lui permettent, l’autorisent à dire n’importe quoi. Tout au plus concède-t-il que son débit verbal l’a trahi1. Mais c’est son positionnement et son absence de réflexion surtout qui lui ont nui.
Et voilà comment l’on porte préjudice à la cause de l’antiracisme, et qu’on transforme les juifs, qui souhaitent probablement qu’on ne règle pas les problèmes d’intégration de la minorité arabo-musulmane en les instrumentalisant, à leurs dépens, en acteurs d’un débat où ils n’ont que faire, on l’a dit.
Un bel exemple d’irresponsabilité.
Espérons qu’à la primaire de la gauche, il lui en sera tenu rigueur, et qu’il sera éliminé.
Serge Soudray
Notes
↑1 | Aveu involontaire ! Peillon oublie au passage que l’accélération du propos est souvent associée au procédé rhétorique qu’il a choisi, l’amplification. |
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