Pour une nouvelle Défense républicaine

Désormais il faut se placer dans la perspective d’une victoire de Marine Le Pen aux présidentielles de 2027. C’est désolant, mais le fait semble assorti de probabilités élevées. Vision catastrophiste ? On aimerait le croire mais par racisme pur et simple, par xénophobie, par ressentiment social, plusieurs groupes sociaux déterminants votent aujourd’hui en masse pour le parti d’extrême-droite. Les classes populaires urbaines et rurales sont majoritairement à l’extrême-droite, c’est acquis ; elles sont rejointes par une partie de la bourgeoisie et des classes moyennes du secteur privé. Les diplômés, dans leur ensemble, sont plus nombreux qu’auparavant à choisir l’extrême-droite. Une … Lire plus

Les grimaces du populisme, la voix de l’extrême-droite

L’essai vif et percutant que livre Claire Sécail, historienne des médias, au sujet de Cyril Hanouna et de sa contribution au projet politique du groupe Bolloré est bienvenu, même s’il sera probablement insuffisant à arrêter la vague de fond qui s’annonce. L’émission Touche Pas à Mon Poste avait défrayé la chronique dès les années 2010 par la vulgarité ostentatoire de ses animateurs, et de Cyril Hanouna en particulier dont la grossièreté et l’impudence sont sans précédent à la télévision française. On se souvient des nouilles versées dans le caleçon de son  acolyte Lire plus

De Paris à Prague, la fabrique de la mémoire anticommuniste

Mai 1968 à Paris fut certainement grisant. « Sous les pavés, la plage », clamait le slogan. Les adeptes du marxisme, léninisme, maoïsme, trotskisme et de peu ou prou toutes les autres idéologies de gauche unirent leurs forces contre le régime archaïque et autoritaire du Général de Gaulle. Des jeunes survoltés occupèrent les universités, dressèrent des barricades et affrontèrent la police dans des batailles épiques qui firent sept morts, tandis que le pays entamait une grève générale qui dura des semaines. Bien que ce niveau de violence ne fût pas louable en soi et que la naïveté de ces idéaux politiques parût quelque peu navrante vu de Prague où la population était déjà autrement plus sensibilisée au potentiel destructeur de ces idéologies, les intentions n’en étaient pas moins relativement nobles. Le mouvement a profondément transformé la société française, passée d’une mentalité conservatrice à une attitude plus ouverte, tolérante et Lire plus

Clin d’œil : votes et sociologie

Voici notre grande étude sur le vote majoritaire dans chacun des grands segments de la société française selon les données recueillies dans une sélection de bistrots parisiens  Les chercheurs de notre CLSEF ont développé un modèle de sociologie électorale qui s’appuie sur les fondements posés par les pères de la discipline, et l’ont enrichi de référentiels internationaux pris aux meilleures sources. Ils proposent de solides facteurs explicatifs pour les choix des électeurs, qui sont souvent prédéterminés par des variables sociales et culturelles lourdes et complexes. Notre méthode mêle quantitatif et qualitatif selon les règles prescrites pour les études conduites en double … Lire plus

L’égoïsme vertueux de Montaigne, ou la fabrique de l’esprit libéral

Voir en Montaigne un précurseur du mouvement que nous qualifions aujourd’hui de « libéral », c’est sans doute assumer à la fois un anachronisme et une ambivalence. Au 16e siècle, le terme de « libéral » renvoie non à une doctrine, mais à une qualité éthique que l’on nommerait aujourd’hui la générosité. Le terme de « libéral » ne désigne une position politique que depuis la fin du 18e siècle, avec Benjamin Constant et Germaine de Staël. Actuellement même, on ne s’entend pas vraiment sur le sens du terme, qui renvoie en France à un mouvement de pensée opposé aux formes jugées excessives de collectivisme, alors qu’au … Lire plus

Le mystère écologiste

S’il y a bien un mystère dans la vie politique française, c’est la médiocrité des scores électoraux des partis écologistes, sous les différents noms qu’ils ont pris depuis quinze ans. La pollution, le réchauffement climatique et le recul de la biodiversité auraient dû conduire à des succès nombreux, et à ce que se constituent autour d’eux des groupes fidèles de militants, de sympathisants et d’électeurs. Rien de cela ne s’est produit, et aux présidentielles comme aux législatives, l’échec et le demi-succès ont été la norme. Tout au plus faut-il mentionner, ces derniers temps, l’élection de maires écologistes dans plusieurs grandes … Lire plus

La Gauche de gouvernement et son équation impossible

A Créteil le 10 juin dernier, les socialistes qui refusent la radicalisation à laquelle La France Insoumise invite la gauche ont pu se compter. Autour de Bernard Cazeneuve, en présence de François Hollande… La salle était pleine. L’écho médiatique a certainement convaincu les présents que leur démarche était attendue, espérée même. Au même moment, la presse rapporte que l’influence de Jean-Luc Mélenchon sur la NUPES est plus forte que jamais, avec noyautage du mouvement par d’authentiques trotskystes du Parti ouvrier européen, tout à sa botte, dans un gauchisme qui  condamne le mouvement à la marginalité, quoi qu’en pensent ses militants … Lire plus

Un illibéralisme de centre-droit au Conseil constitutionnel

Ces deux derniers jours, la décision du Conseil constitutionnel a donné lieu à un certain nombre de débats qui voient thèses et antithèses se répondre dans une chorégraphie prévisible : décision de pur droit / décision de convenance politique, juges indépendants / juges soumis…. Elle masque que les questions sont d’abord mal posées. Il faut vraiment venir de la Lune aujourd’hui pour soutenir que le politique et le juridique sont deux ordres séparés, et venir de Mars pour imaginer qu’ils sont confondus. Les choses sont plus complexes. Mais c’est, ce 16 avril, oublier l’essentiel, et qui est ceci : le Conseil … Lire plus

Néo-communisme et social-écologie

Dans son célèbre ouvrage de 1928 sur le socialisme, le sociologue Durkheim l’opposait au communisme de façon radicale. Le communisme, dit-il, consiste dans une excommunication des fonctions économiques, et c’est par cette tendance qu’il se définit, alors que le socialisme au contraire tend à les intégrer plus ou moins étroitement dans la communauté humaine. Le communisme tient tout entier dans un sursaut de la conscience morale abstraite, note-t-il, qui n’est d’aucun temps, ni d’aucun pays, et qui conteste les conséquences morales de la propriété privée en général. Il ne s’occupe qu’accessoirement des arrangements économiques proprement dits et ne les modifie … Lire plus

François Furet à contretemps

Voici un quart de siècle que François Furet (1927-1997) a disparu. L’abécédaire que propose opportunément Deborah Furet vient réveiller nos mémoires assoupies. Furet fut l’un des grands intellectuels français de la seconde moitié du siècle dernier, inlassable analyste de son temps à la lumière d’une histoire politique dont il fut l’un des plus subtils connaisseurs. Il en connut lui-même les tourments dès les années sombres. Spectateur engagé à la manière d’un Raymond Aron dont l’action et la pensée le marquèrent, Furet, à la différence de ce dernier, fut communiste dans les années 1950 avant d’engager une critique sans concession de toutes les contractures idéologiques qui accablèrent de plus en plus la gauche à la fin du XXème siècle et dont elle pourrait bien périr aujourd’hui. Sa mort coïncida presque avec l’effondrement d’une famille politique qui naquit sur les fonts baptismaux de la Révolution française, dont Furet fut aussi l’un des grands experts.

Cette fonction critique tournée vers sa propre sensibilité lui valut d’innombrables adversaires, à gauche, qui firent de lui l’un des responsables des « dérives libérales » dénoncées aujourd’hui par la « gauche radicale ». Lire plus