Portrait d’Itkine, d’Olivier Barrot

L’écrivain et journaliste Olivier Barrot donne aujourd’hui un livre court et gentiment décousu, mais aussi très attachant. Son livre sur Sylvain Itkine, cet acteur des années 30 qu’on voit dans certains films de Jean Renoir et qu’on voyait surtout sur scène dans ces années-là, a le pouvoir de faire revivre les milieux du théâtre et du surréalisme d’avant-guerre. Il fait aussi revivre pour les années 40, la vie de ces artistes réfugiés à Marseille qui essayent de survivre tout en conservant leur art. Certains s’engageront dans la Résistance. Cet engagement sera fatal à Sylvain Itkine qui sera arrêté et mourra … Lire plus

Un mélodrame du présent italien

Le public français peut se demander si le le film de Paola Cortellesi, « Il reste encore demain », a eu le succès phénoménal qu’il a connu en Italie parce que les Italiens sont, pour des raisons historiques et culturelles, très sensibles à une certaine esthétique néoréaliste au cinéma. De fait, le noir et blanc superposé à un récit qui se passe dans un quartier populaire de la Rome de l’après-guerre, où les traces matérielles et immatérielles du conflit sont très présentes, où la misère est la première chose que la population partage, où la disparition de Mussolini a fait des heureux mais surtout des nostalgiques… Lire plus

Albert Camus dans Contreligne

L’Étranger, 1942-2012, avec des dessins de José Muñoz, Alice Kaplan, 24 juin 2012 Albert Camus, d’Alger à New-York, Alice Kaplan, septembre-octobre 2012 Camus et le cinéma, Philip Watts, septembre-octobre 2013 Meursault, contre-enquête » de Kamel Daoud, Alice Kaplan, 28 juin 2014 David Oehlhoffen, Albert Camus et Loin des hommes, Alice Kaplan, 15 janvier 2015 1914, suite et fin : Albert Camus, « Le premier homme », extrait, 5 mai 2015 Paris dans les Carnets d’Albert Camus, Alice Kaplan, 2 décembre 2016 L’Etranger ou les bienfaits de la guillotine, Stéphan Alamowitch, 15 février 2024 Illustration tirée de l’ouvrage de José Muñoz

Justice et cinéma, ce vieux couple

Gaby Morlay dans "Accusée, Levez-vous", de Maurice Tourneur (1930)

Notre entretien avec l’auteur de « La Justice au Cinéma », paru en octobre dernier, l’excellente analyse d’un couple presque aussi vieux que le cinéma. – Thibault de Ravel d’Esclapon, vous montrez de façon très convaincante que le cinéma et la justice entretiennent des relations qui vont bien au-delà des prétoires et des films qui sont directement consacrés aux procès. Quelle distinction faites-vous entre le film de prétoire et ce que vous appelez le film de justice ? Lire plus

L’enlèvement, de Marco Bellochio

Après Marx peut attendre (2021), documentaire sur et avec la famille Bellocchio qui éclaire, en les citant directement à l’écran, les films de sa trilogie biographique (Les Poings dans les poches, 1965, Les Yeux, la bouche, 1982, Le Sourire de ma mère, 2002) et met en évidence, plus généralement, l’impact de cette histoire familiale dramatique sur la quasi-totalité de son œuvre, Marco Bellocchio réalise avec L’enlèvement un film qui imbrique magistralement la grande Histoire et l’histoire particulière d’une famille déchirée, le passé et l’actualité. L’enlèvement est en effet une condamnation sans appel de tout intégrisme religieux, et de l’intégrisme catholique … Lire plus

Le dernier Guédiguian, joli film d’un autre temps

On trouvera dans le nouveau film de Robert Guédiguian, Et la fête continue !, tout ce qu’on trouve d’habitude et qu’on aime dans ses films : Ariane Ascaride, Jean-Paul Darroussin, une chronique familiale douce-amère, une touche arménienne, Marseille. On trouvera aussi l’engagement généreux, classique de la gauche d’autrefois, proche de ce que pouvait être les idéaux communistes au temps de l’Union de la gauche, au moins chez les militants de base – militant communiste tel que l’est resté le frère du personnage principal, bien conscient d’être parmi les derniers du genre. Ce personnage principal, c’est Rosa, infirmière ou médecin à l’hôpital … Lire plus

ANSELM. Le bruit du temps – Quand Wim Wenders filme Anselm Kiefer

ANSELM. Le bruit du temps est la dernière création de l’auteur des Ailes du désir (1987), qui reçut la Palme d’or en 1984 pour Paris, Texas, et fut dernièrement récompensé pour l’ensemble de son œuvre par le Prix Lumière à Lyon. Depuis le début du XXIe siècle, et après Pina (2011), consacré à la danseuse et chorégraphe Pina Bausch, Wim Wenders paraît plus inspiré par l’univers du documentaire que par celui de la fiction.  ANSELM. Le bruit du temps n’est toutefois réductible ni à ce terme, ni à ce genre. Par-delà l’intensité émotionnelle que dégage le film, par-delà la beauté à couper le souffle de l’image, le spectateur ressent la proximité qui unit le cinéaste de renommée internationale et son sujet, l’un des plus grands artistes plasticiens contemporains. Lire plus

Le Frankenstein de l’atome : Oppenheimer et l’angoisse de la destruction créatrice

Sur le plan historique et dramatique, l’Oppenheimer de Christopher Nolan est un film riche, moralement complexe, psychologiquement sophistiqué, épiquement grandiose ; il est visuellement époustouflant, bien rythmé par une bande-son à couper le souffle, et il est extraordinairement bien interprété – un merveilleux mélange de science, de politique, de psychologie et d’art. Il pourrait remporter presque autant d’Oscars qu’il y eut de lauréats du prix Nobel parmi la myriade de scientifiques travaillant sous la direction de J. Robert Oppenheimer au projet Manhattan, dans la course à la bombe atomique entre le printemps 1942 et l’été 1945 – été 1945 au cours … Lire plus

Le Ciel rouge de Christian Petzold

Après Barbara (2012), Transit (2018) et Ondine (2020), Christian Petzold, sans doute le cinéaste allemand actuel le plus intéressant, réalise avec Le Ciel rouge (2023), Ours d’argent, Grand Prix du jury du festival de Berlin 2023, une œuvre d’une grande subtilité dont l’humour, le comique et l’insouciance idyllique du début cèdent peu à peu la place à la menace environnementale de prime abord peu alarmante, car distante. Ainsi s’éloigne progressivement la référence au long-métrage Pauline à la plage (1983) d’Eric Rohmer, l’un des metteurs en scène préférés du réalisateur allemand. L’œuvre de Petzold se distingue en effet par sa dimension écologique … Lire plus

Éric Rohmer, le Brexit et l’Angleterre

Éric Rohmer, ce n’était pas son vrai nom. Il nait Maurice Schérer, nom que sa mère lui maintint toute sa vie. Pour elle, Maurice était professeur dans un lycée à Paris, et elle n’a jamais su qu’il existait un Éric Rohmer, ni que son fils était un cinéaste de renommée internationale et un ancien rédacteur en chef des Cahiers du cinéma. Son cinéma, lui aussi, s’est fait dans l’effacement de soi. Rohmer idolâtrait André Bazin, l’influent théoricien du cinéma qui affirmait que le cinéma était « l’aboutissement dans le temps de l’objectivité photographique », que le film devait renoncer à l’artifice de … Lire plus