Erreurs et préjugés : la crise ukrainienne

Bruno Bisson vit et enseigne en Russie. Son point de vue sur la crise ukrainienne, dans son état au 5 juillet 2014, nous a paru assez original pour être communiqué à nos lecteurs, même si nous ne le partageons pas. Il a le mérite de mettre en lumière des faits déplaisants à reconnaitre, telles les violences contre les manifestants pro-russes à Odessa au début de l’été, documentées par un terrible reportage de Paris Match, faits qu’on aurait tort d’écarter comme procédant de la seule propagande russe. Il souligne les erreurs américaines et européennes dans la gestion des relations avec la … Lire plus

Calim’héros, le super rebelle

« Pas de promo, aucun journal. Cela pourrait nuire à notre image. C’est beaucoup trop commercial. Surtout très peu d’ambition. Pas question d’une éventuelle évolution pour qu’on m’accuse de trahison Ah non ! De l’underground je suis le champion. » Reste underground – IAM – 1993 On reconnaît le rebelle aux attitudes suivantes : il condamne beaucoup, il ne propose rien,  ni nouveau modèle de société ni petite amélioration. En bref , le rebelle n’est pas réformiste. Être réformiste suppose d’accepter le système dominant. Et – avec celui-ci – le rebelle considère qu’une seule interaction est acceptable : la confrontation.  Les autres modes sont inacceptables car ils … Lire plus

Roger Martin du Gard, l’été 14, « Les Thibault, III »

Enfin, les deux jeunes gens purent approcher à leur tour. Sur la petite feuille rectangulaire, fixée au carreau par quatre pains à cacheter rosâtres, une écriture impersonnelle, appliquée, une écriture de femme, avait tracé ces trois lignes, sagement soulignées à la règle : mobilisation générale le premier jour de la mobilisation est le dimanche 2 aout Jenny serrait contre son buste la main que Jacques avait glissée sous son bras. Lui, il restait immobile. Comme les autres, il pensait : « Ca y est. » Dans son cerveau, les pensées se succédaient, très vite.  (…) Ainsi, pendant des semaines, il avait vécu, sans douter … Lire plus

Jean Paulhan, l’été 14, « Le Guerrier appliqué »

Je parais plus grand que mon âge — je m’appelle Jacques Maast, et j’ai dix-huit ans. Quand c’a été la troisième semaine de guerre, tout le monde et les filles du village où je passe mes vacances d’étudiant, me demandent : « Tu ne t’en vas pas ? ». Ces paysans me connaissaient depuis mes grands-parents : ils avaient de moi une opinion ancienne, et que je respectais. Ensuite je les sentais supérieurs à moi par leurs habitudes et jusqu’à l’ordre de leurs plaisanteries. La conviction que j’étais bien plus instruit restait ici pure et faible : elle ne me … Lire plus

Colette, l’été 14, « Les heures longues »

La nouvelle Saint-Malo, août 1914. La guerre ?… Jusqu’à la fin du mois dernier, ce n’était qu’un mot, énorme, barrant les journaux assoupis de l’été. La guerre ? Peut-être, oui, très loin, de l’autre côté de la terre, mais pas ici…. Comment imaginer que l’écho même d’une guerre pût franchir ces rochers, farouches uniquement pour que semblent plus doux, à leurs pieds, la vague, le gazon marin clairsemé, le chèvrefeuille, le sable gaufré par la petite serre des oiseaux…. Ce paradis n’était point fait pour la guerre, mais pour nos brèves vacances, pour notre solitude. Les récifs cachés sous la … Lire plus

« Quand je servais dans l’U.S. Army » : l’expérience du combat de 1945 à l’Irak

Ramiro G. Hinojosa, analyste en sciences politiques à Austin, Texas, a servi en Irak en 2006 et 2007 au sein de la 82ème Division aéroportée. Ndlr _____ Le 6 juin 2014  marque le 70ème anniversaire du D-Day, le déclenchement du débarquement allié, une opération colossale, écrasante, presqu’inimaginable à l’époque actuelle, qui conduisit à la mort de près de 1 500 Américains lors de la plus importante invasion aérienne, terrestre et navale de l’histoire militaire. Il n’est pour ainsi dire personne aux Etats-Unis dont la vie n’ait été ébranlée par la seconde conflagration planétaire. Entre 1941 et 1945, 18 millions de … Lire plus

Comment protéger Finkielkraut contre lui-même ?

Les auditeurs de l’émission Répliques, le samedi matin sur France Culture, sont probablement nombreux à s’inquiéter pour la santé mentale d’Alain Finkielkraut. Clair et cohérent quand il parle de littérature, il s’emballe, perd ses moyens et fait ressortir une structure mentale altérée dès qu’il parle d’immigration. L’émission du samedi 21 juin, avec l’économiste Olivier Pastré, probablement sidéré des âneries qu’il entendait, et Hervé Juvin, cet homme d’affaires essayiste qui ne dépasse jamais le niveau d’un salon réactionnaire du VIIème arrondissement ou de Versailles, en est un témoignage étonnant – et nous incitons nos lecteurs à le vérifier par eux-mêmes (lien … Lire plus

Gabriel Chevallier, l’été 14, « La Peur »

« Le danger de ces communautés (les peuples), fondées sur des individus caractéristiques d’une même sorte, est l’abêtissement peu à peu accru par hérédité, lequel suit d’ailleurs toujours la stabilité ainsi que son ombre. » Nietzsche « Le feu couvait déjà dans les bas-fonds de l’Europe, et la France insouciante, en toilettes claires, en chapeaux de paille et pantalons de flanelle, bouclait ses bagages pour partir en vacances. Le ciel était d’un bleu sans nuages, d’un bleu optimiste, terriblement chaud : on ne pouvait redouter qu’une sècheresse. Il ferait bon à la campagne ou à la mer. Les terrasses de café sentaient l’absinthe … Lire plus

Stefan Zweig, l’été 14, « Le Monde d’hier, Souvenirs d’un européen »

« Le lendemain matin en Autriche ! Dans chaque station étaient collées les affiches qui avaient annoncé la mobilisation générale. Les trains se remplissaient de recrues qui allaient prendre leur service, des drapeaux flottaient. A Vienne, la musique résonnait et je trouvai toute la ville en délire. La première crainte qu’inspirait la guerre que personne n’avait voulue, ni les peuples, ni le gouvernement, cette guerre qui avait glissé contre leur propre intention des mains maladroites des diplomates qui en jouaient et bluffaient, s’était retournée en un subit enthousiasme. Des cortèges se formaient dans les rues, partout s’élevaient soudain des drapeaux, s’agitaient … Lire plus

Jules Romains, l’été 14, « La victoire en chantant »

« Jamais tant d’hommes à la fois n’avaient dit adieu à leur famille et à leur maison pour commencer une guerre les uns contre les autres. Jamais non plus des soldats n’étaient partis pour les champs de bataille mieux persuadés que l’affaire les concernait  personnellement. Tous ne jubilaient pas. Tous ne fleurissaient pas les wagons, ou ne les couvraient pas d’inscriptions gaillardes. Beaucoup ne regardaient pas sans arrière-pensée les paysans qui, venus le long des voies, répondaient mal aux cris de bravade et saluaient un peu trop gravement ces trains remplis d’hommes jeunes. Mais ils avaient en général bonne conscience. … Lire plus